dodis.ch/44152
L’Adjoint à la Division des Affaires étrangères du Département politique, Ch. E. Lardy, au Ministre de Suisse à Vienne, Ch.D. Bourcart1

Nos lettres du 2 mai2 Vous ont transcrit simplement, en toute hâte, les désirs du Département des Finances et de celui de Justice, au sujet de la question du Vorarlberg. Maintenant que le vote a eu lieu, je me permets de Vous écrire un peu plus longuement et de Vous demander Votre appui, en vue d’arriver à ce que les études que le Département est chargé de faire puissent avoir lieu d’une manière sérieuse et consciencieuse. Si nous voulons que cette affaire soit réellement étudiée, de manière à permettre au Conseil fédéral d’abord, puis à l’Assemblée et au peuple de se faire une opinion, nous ne pouvons pas nous borner à glaner de-ci delà quelques bribes d’informations, et nous devons tenter d’établir un dossier réellement bien nourri et bourré de faits et de chiffres exacts.

Sur la question financière, les Basler Nachrichten du 13 Mai contiennent un article que je Vous envoie. Je Vous serais infiniment reconnaissant si Vous pouviez me dire si et jusqu’à quel point les chiffres cités et les calculs faits Vous paraissent exacts. Quant à la dette du Vorarlberg tout seul, indépendamment du reste de l’Autriche, on nous dit qu’elle consiste en 2 à 3 millions de couronnes: est-ce vrai?

Il nous faudrait aussi connaître le budget du Vorarlberg, ses recettes et ses dépenses.

Pour ce qui concerne les chemins de fer, je crois que nous sommes relativement bien renseignés: le rapport des Chemins de fer fédéraux et les exposés de M. Gelpke dans les Basler Nachrichten sont assez complets: ces derniers se basent, il est vrai, sur un désir d’annexion qui peut leur avoir donné une tournure trop favorable?

Pour la question des forces hydrauliques, nous avons le rapport d’un employé suisse, qui avait fait une expertise sur les lieux avant la guerre, sur la demande des autorités Vorarlbergeoises, lesquelles, déjà alors, se défiaient de l’Autriche et voulaient organiser leur système hydraulique sur le modèle suisse.

Quant à la question religieuse, je me sens tout à fait incompétent. Vous savez qu’on parle de la suppression de l’article de la constitution sur les Jésuites; mais il y a plusieurs autres articles qui pourraient entrer en ligne de compte. Il serait très utile de pouvoir mâcher un peu la besogne au Département de Justice et Police et de lui transmettre, avec les documents dont il a besoin pour faire son étude, des renseignements complémentaires, des résumés clairs, et peut-être même certaines conclusions préliminaires. Il ne s’agit d’ailleurs pas seulement de la question religieuse, mais de toute la législation du Vorarlberg, qui doit être étudiée comparativement à la nôtre. Je crois qu’il existe au Vorarlberg des privilèges pour les fabricants de tabac et de poudre; enfin tout ce domaine devrait naturellement être éclairci.

Je sais que Vous êtes surchargé de besogne et qu’il est de la dernière indiscrétion de Vous demander encore votre concours pour de pareils travaux, mais Vous avez à Vienne un attaché qui m’a paru s’intéresser vivement à la politique: M. Burckhardt. Je suis sûr que si Vous vouliez bien le charger de bûcher un peu le Vorarlberg, il nous rendrait ce service. Voulez-vous le lui demander de ma part? Car nous ne devons point nous dissimuler qu’avec le rattachement de l’Autriche à l’Allemagne, l’affaire du Vorarlberg est au tout premier rang parmi les questions internationales qui nous touchent.

M. Calonder serait, je le sais, disposé à accorder toutes les facilités qui pourraient être nécessaires pour provoquer une étude complète et rapide du sujet: frais supplémentaires de M. Burckhardt pour voyages ou recherches et, éventuellement, augmentation provisoire de Votre personnel s’il le fallait.

Pardon de Vous avoir retenu si longtemps et d’abuser de Votre bonne volonté et de celle de Votre collaborateur, et veuillez croire, M. le Ministre, à mon entier et respectueux dévouement.

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Lettre: E 2200 Wien 10/2.
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Non reproduites, cf. E 2200 Wien 10/2.