Conformément aux instructions reçues, j’ai téléphoné à M. Ruegger pour lui demander quelle portée il fallait attacher à la conversation de M. de Torrenté avec M. Bonnefon-Craponne2 au sujet des attaques qui se prépareraient à l’égard de l’attitude suisse vis-à-vis de la proposition 3 du Comité de coordination3.
M. Ruegger répond:
1° qu’il ne doit pas être fait état de cette conversation, qui doit rester confidentielle;
2° que l’avis, qui nous a été donné dans un esprit particulièrement amical, doit être pris au sérieux;
3° qu’une contre-action est opportune;
4° qu’en ce qui concerne Paris, elle a déjà été entamée par une conversation avec M. Rochat, au sujet de laquelle un rapport détaillé nous est expédié ce soir4.
M. Ruegger ne peut pas s’expliquer ouvertement au téléphone. Il me laisse entendre, cependant, que M. Rochat reste très bien disposé, qu’il a compris que la France n’a pas intérêt à nous mettre dans l’embarras et qu’il a promis de surveiller les services techniques.
M. Ruegger n’exclut pas qu’une démarche de M. Dunant auprès de M. Laval serait opportune (je crois même comprendre que des instructions à cet égard nous ont été demandées), mais il dit que rien ne presse, car M. Laval est inabordable en ce moment et qu’il suffira d’aviser lundi ou mardi.
M. Ruegger conseille une démarche verbale un peu vague de nos Ministres à Bruxelles, Madrid et Stockholm5. Cette démarche pourrait revêtir la forme suivante: remise du texte de l’accord de clearing6 avec remarque que nous avons fait tout ce à quoi nous nous sommes engagés et que des chicanes sur notre attitude et la portée de la Déclaration de Londres7 pourraient avoir des conséquences graves. Eviter toute indication précise au sujet de la possibilité de ces chicanes. Il serait bon que des instructions dans ce sens partissent demain déjà.
M. Ruegger déconseille, en revanche, pour le moment, une démarche à Londres. (Si l’on essaye de nous prendre de nouveau par surprise, ne pas montrer que nous sommes au courant.)