dodis.ch/50145Circulaire du Chef du Service économique et financier du Département politique, J. Zwahlen, aux représentations suisses à l'étranger1

Nouvelles mesures de la BNS en faveur de la stabilisation du franc suisse

Extrait

Nous revenons sur notre Wochentelex du 2 octobre 19782, par lequel nous vous annoncions l'envoi d'explications relatives aux mesures prises par la BNS, d'entente avec le CF, en faveur de la stabilisation du franc suisse. À ce titre, vous trouverez, en annexe, le communiqué de presse3 du 1er octobre de la BNS (en français, allemand et anglais). Malgré cela, nous estimons nécessaire de vous envoyer des explications et commentaires supplémentaires. Ceux-ci sont consignés ci-après.

I Introduction

L'évolution préoccupante du cours du franc, ces derniers temps notamment, a incité la BNS, d'entente avec le CF, à reconsidérer sa politique monétaire en renforçant les mesures qu'annonçait déjà en partie le communiqué de presse diffusé à la mi-août à l'issue de la séance4 du CF et à laquelle avaient assisté le Président de la BNS5 et le Directeur de la Division du Commerce6.

II Caractéristiques des nouvelles mesures7

Les modifications apportées à la formulation de notre politique monétaire ont les principales caractéristiques suivantes:

  • a) L'accent qui était placé sur une croissance modérée de la masse monétaire et la priorité de la lutte contre l'inflation est désormais déplacé sur la défense du cours du change8.
  • b) La volonté de stabiliser le franc par rapport au mark en fixant une limite absolue – 0,80 – à sa revalorisation par rapport au DM. La conséquence est que le franc suisse ne flotte plus9 par rapport au DM, monnaie de notre principal partenaire et concurrent commercial10.
  • c) Un assouplissement assez poussé des dispositions de l'Anlageverbot11. Cette mesure est en quelque sorte vidée de sa substance. Il ne faudrait cependant pas trop diffuser ce renversement de politique pour des raisons tirées du comportement imprévisible du marché et d'ordre psychologique (!).
  • d) Une volonté de favoriser les exportations de capitaux.
  • e) Une volonté de faire baisser les taux d'intérêt.
  • f) Un examen des mesures qui pourraient être prises pour faciliter à l'ensemble de nos industries d'exportation12 et du tourisme les opérations sur le marché à terme. À cet égard, il conviendrait d'éviter l'expression en partie inexacte de «garantie de change» utilisée dans le communiqué de presse de la BNS. Cette expression a déjà donné l'impression, à l'étranger, que nous allions adopter un double marché13.

III Analyse des mesures

A) Politique d'interventions

La nouvelle politique d'interventions poursuit l'objectif d'avoir une action plus prononcée sur les cours du change pour tenter de casser l'appréciation excessive de notre monnaie14.

À cette fin, la BNS agira par les moyens suivants:

  • i) des interventions énergiques (frs 3 milliards dans la semaine du 2 au 6 octobre), donc en principe plus massives que celles qui ont été faites jusqu'à maintenant. Le CF et la BNS acceptent, en ce faisant, la création d'une forte liquidité intérieure.
  • ii) des interventions non plus seulement en $, mais en d'autres monnaies si les banques centrales des pays concernés les autorisent.

    Nous vous signalons, dans ce contexte, que la BNS a pu intervenir en francs belges et en florins hollandais. Ces interventions, étroitement concertées avec les banques centrales des pays concernés et avec la Bundesbank, ont visé à soutenir le cours de ces monnaies qui étaient au ventre du serpent.

    La BNS n'a pas obtenu, à ce jour, l'autorisation d'intervenir en DM. La principale difficulté à l'égard de cette monnaie réside dans le fait qu'étant déjà au dos du serpent15, toute intervention en DM de la BNS eut tiré le serpent vers le haut et rendu d'autant plus difficile la position des monnaies faibles.

  • iii) des interventions autonomes pour fixer (comme mentionné ci-dessus) une limite absolue à la revalorisation du franc suisse par rapport au DM.

    Le communiqué de la BNS a eu une portée malheureuse («élever le cours du mark allemand par rapport au franc suisse à un niveau nettement au-dessus de 80 francs pour 100 marks et, par la suite, à le raffermir dans la mesure du possible») en ce sens qu'il a incité les débiteurs étrangers à surseoir au paiement des factures en attendant des cours meilleurs.

    La relation fr/DM supplante donc celle fr/$. Ce revirement n'a pas encore été toujours saisi par les opérateurs du marché. C'est cette méprise qui a incité certains journaux à écrire que la nouvelle politique d'interventions de la BNS avait fait long feu, puisque malgré des interventions massives elle n'avait pas réussi à contenir l'érosion du $ par rapport au franc suisse.

[...]16

1
Circulaire: CH-BAR#E2001E-01#1988/16#1115* (C.41.121.0). Rédigée par J.-C. Richard et J. Zwahlen.
2
Télex Nachtrag zu Wochentelex Nr. 37/78 du 3 et non du 2 octobre 1978, dodis.ch/50181.
3
Communiqué de presse de la Banque nationale suisse du 1er octobre 1978, dodis.ch/50453.
4
Cf. le PVCF No 1355 vom 23. August 1978, dodis.ch/50177.
5
F. Leutwiler.
6
P. R. Jolles.
7
Cf. DDS, vol. 27, doc. 128, dodis.ch/49895.
8
Cf. la notice de D. de Pury à P. Aubert du 3 octobre 1978, dodis.ch/50146.
9
Cf. DDS, vol. 27, doc. 127, dodis.ch/49898, note 3.
10
Cf. DDS, vol. 27, doc. 88, dodis.ch/50265, en particulier note 3.
11
Cf. DDS, vol. 27, doc. 17, dodis.ch/49295, note 4.
12
Ibid., note 6.
13
Cf. la notice de l'Administration des finances du Département des finances et des douanes de 1978, dodis.ch/50455.
14
Pour une évaluation de cette nouvelle politique monétaire, cf. la notice de J. Zwahlen à P. Aubert du 30 octobre 1978, dodis.ch/50147.
15
Cf. DDS, vol. 26, doc. 141, dodis.ch/39506, note 5; doc. 161, dodis.ch/39509 et doc. 170, dodis.ch/39508.
16
Pour la version complète du document, cf. dodis.ch/50145.